J’enseigne depuis plus de 30 ans et j’ai connu bien des transformations concernant la transmission musicale. De la docte posture du maître à l’élève à la mise en « autonomie  » de l’élève aboutissant au questionnement tous azimuts. « Que penses-tu de ce que tu as fait ? », « comment te sens-tu ? »: combien de fois ai-je entendu ces questions émises par l’enseignant lors d’observations de cours ou d’examens pédagogiques !

Cela soulève plusieurs questions (!) :

  • de la tyrannie du dogme et celle du « décide par toi-même », quelle est la place de l’élève ? Dans les deux cas, le jeune élève n’a en effet guère de liberté, entre l’application pure et simple ou bien l’énigme du trop précoce « connais-toi toi-même ».
  • trop fréquemment, l’enseignant ne se condamne-t-il pas à une posture au détriment d’un savoir-être ? En effet, de quels enseignants se souvient-on ? Majoritairement, de ceux qui vous faisaient briller les yeux en les ayant eux-mêmes brillants (dans tous les sens du terme !). Ceci n’est pas l’éloge de la suprématie du comportement sur les compétences, loin s’en faut. Chacun sait combien est nécessaire la connaissance approfondie des méthodes qui ont façonné depuis des lustres l’apprentissage musical. Mais, tout de même, in fine, les faits sont têtus et la mémoire est tenace…
  • face aux nouvelles technologies, n’y a-t-il pas un nouvel enjeu ? Le professeur ne devient-il pas de facto co-élève ou élève lui-même ? C’est une révolution. La transmission est reconsidérée; une troisième voie, indéfinie encore, émerge. Une preuve : il fait avoir observé le regard d’un élève lorsque vous lui demander d’aller chercher une partition en bibliothèque ou, pire, de l’acheter… vous êtes aussi exotique que lorsque votre enfant vous voit coller un timbre sur une lettre ! La question du sens des outils pédagogiques est ainsi renouvelée.

Réagissez à cette courte réflexion. Il ne s’agissait pas d’une communication scientifique, mais d’une observation qui en appelle d’autres: les vôtres.